Les Experts CDP – Emmanuel Chomier, Converteo

Le marché des Customer Data Platforms connaît une forte croissance. De quoi s’agit-il ? Quelles sont les caractéristiques de cette technologie nouvelle génération d’unification de la donnée clients ? Quelles sont ses spécificités par rapport aux autres solutions de « Référentiel Client Unique » (RCU) ? Quels bénéfices ? Quel coût ? Quel ROI ?

Nous avons voulu recueillir le regard des experts de la CDP, pour obtenir leur éclairage et offrir à nos lecteurs différents points de vue sur la Customer Data Platform. Nous sommes allés à la rencontre des acteurs & techniciens de la CDP : consultants, intégrateurs, éditeurs… Pour inaugurer cette série, nous accueillons Emmanuel Chomier, consultant Media & CRM chez Converteo, avec lequel nous avons eu le plaisir d’échanger. Nous le remercions de s’être prêté au jeu des questions-réponses.

experts cdp emmanuel chomier

Cabinet de conseil en Données Clients, CustUp a publié en partenariat avec imagino un livre blanc au sujet de la Customer Data Platform que vous pouvez télécharger en utilisant le formulaire ci-dessous.

Vous êtes Emmanuel Chomier et vous intervenez pour Converteo. Pouvez-vous nous présenter Converteo en quelques mots ? Quel est votre rôle dans cette organisation ?

– Converteo est un partenaire conseil data & techno constitué de 180 consultants et experts. Accélérateur de performance, intervenant du cadrage à la réalisation, connecteur entre le marketing et l’IT, indépendant, nous œuvrons pour le transfert de compétences.

Je suis dans la division dédiée au CRM & Media, en charge de tous les sujets liés à la mesure de la performance, dans une approche transverse. Je travaille sur des logiques d’audience et des problématiques d’unification de l’écosystème outils. C’est sur cette logique d’unification d’écosystèmes que je suis amené à travailler sur des technologies CDP.

Quelle est la définition maison de la CDP selon Converteo ?

– Ce n’est pas facile de définir la CDP en une phrase. Disons que la CDP est une plateforme qui permet de consolider et uniformiser sa donnée clients pour mieux l’activer. Quelqu’un qui a besoin d’une CDP, c’est quelqu’un qui a de la donnée CRM dispersée dans une myriade d’outils et qui a besoin de la centraliser dans un seul endroit, dans un même format et qui, une fois qu’il a réalisé ce travail de consolidation et d’uniformisation, a besoin de la communiquer à beaucoup de plateformes différentes. Les trois notions clés sont : consolider, uniformiser et activer la donnée CRM.

Tout savoir sur la CDP !

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La Customer Data Platform appliquée à la relation clients

Découvrez les caractéristiques de la CDP. Qualifiez ses potentialités et comprenez ses conditions de mise en œuvre, son coût et son Retour sur Investissement.

En recevant le Livre Blanc, je confirme accepter le traitement de mes données personnelles par les coauteurs CustUp et imagino, pour permettre la réception de celui-ci et de communications complémentaires en lien avec celui-ci. Mes données seront traitées conformément à la Déclaration de confidentialité.

En matière de projets CDP, quelles sont les principales familles d’interventions menées aujourd’hui par Converteo ?

– La première grande famille d’intervention est un accompagnement très « conseil » destiné à aider nos clients à prendre la bonne décision à partir de cas d’usage CRM qu’ils ont en tête. Nos clients ont conscience que de la donnée circule dans leur entreprise et aimeraient activer cette donnée clients sur des canaux, que ce soit le CRM, la personnalisation du site web, les media. Ils nous contactent pour qu’on les aide à définir la meilleure stratégie d’activation des données clients.

C’est une approche conseil assez classique avec des ateliers et surtout des cartographies d’écosystèmes afin d’identifier la solution technologique la plus pertinente pour répondre au besoin du client. On se rend compte qu’on benchmarke essentiellement trois types de solutions :

  • Les solutions du marché, où il s’agit de sélectionner une solution RCU / CDP sur l’étagère.
  • Les solutions custom, où l’on va répliquer certaines fonctionnalités d’une CDP mais avec des développements custom pour s’intégrer le plus facilement possible dans l’écosystème de l’entreprise. Dans ce cas, on développe nous-même la CDP ou le RCU qui va permettre de réaliser les cas d’usage.
  • La dernière solution consiste à s’appuyer sur des outils déjà déployés par l’entreprise dont on va optimiser le paramétrage pour déployer des cas d’usage CDP.

Solutions du marché Vs solutions custom Vs capitalisation sur l'outillage existant : Comment choisir ?

– Il y a plusieurs dimensions. Il y a d’abord les dimensions classiques de tout benchmark : l’impact organisationnel et le coût de la solution.

L’impact organisationnel : L’entreprise a-t-elle les ressources pour gérer une solution custom ? Sinon, a-t-elle le budget pour externaliser le support technique de cette solution ? Si l’entreprise n’a ni les ressources en interne ni le budget pour externaliser, a-t-elle les moyens de s’offrir une licence via une solution ad hoc qui, à l’aide d’un accompagnement éditeur, d’account managers, lui permettrait d’utiliser la plateforme sans devoir gérer l’organisation et la maintenance du dispositif ? C’est la question des ressources financières, humaines et techniques de l’entreprise.

Il y a aussi toute la logique de fonctionnalités. Plus on envisage un scope complexe de cas d’usage, plus on peut être amené à s’appuyer sur un éditeur qui propose une solution sur l’étagère permettant de cocher une grande partie des cas d’usage. A l’inverse, plus on a une approche concentrée sur quelques cas d’usage générateurs de valeur, plus on a tendance à privilégier les approches custom ou l’optimisation du paramétrage des outils existants.

Vous intervenez dans la sélection des solutions CDP. Quelle est votre deuxième famille d'interventions en matière de projets CDP ?

– La deuxième famille de projets est portée en commun avec Converteo Technology et concerne le déploiement des solutions CDP / RCU. Les missions de déploiement s’étendent en général de 5 à 6 mois. C’est le temps qu’il faut pour avoir une plateforme parfaitement intégrée dans l’écosystème et déployer les cas d’usage générateurs de valeur.

Quels sont les cas d’usage sur lesquels, d’après votre expérience, la CDP fait la différence ?

– Il y a tout d’abord des cas d’usage orientés business. Ce sont tous les cas d’usage qui vont permettre d’améliorer la conversion sur un asset, en magasin ou sur le site web. Ce sont les cas d’usage consistant à organiser le parcours web-to-store ou les cas d’usage qui vont permettre d’organiser les parcours uniquement web : la gestion des paniers abandonnés, la gestion des parcours, la personnalisation du site… Les cas d’usage appartenant à cette famille peuvent être mesurés par un taux de conversion direct sur le site. Ce sont des cas d’usage directement générateurs de valeur.

Il y a une deuxième famille de cas d’usage. Ce sont selon moi des cas d’usage qui génèrent plus de valeur encore, même s’ils sont difficiles à mesurer. Ces cas d’usage concernent tout ce qui est lié à la gestion d’un service client où l’on va se servir de la donnée web pour optimiser la manière dont fonctionne le centre d’appels : gérer le flux et gérer l’accès de l’information aux collaborateurs du centre d’appels pour mieux gérer les leads entrants, être plus efficace. Le ROI est souvent plus difficile à mesurer, on peut être sur des indicateurs non monétaires (temps de traitement, etc.) mais qui in fine ont pour l’entreprise une valeur plus importante. En plus de générer des leads offline, un service client efficient génère un impact positif sur l’image de marque. C’est à ce niveau-là qu’on va avoir des cas d’usage très poussés, innovants et intéressants.

La CDP permet de faire sauter les frontières entre les canaux du commerce et de l’interaction client...

– En effet. Sur le web, la CDP va permettre d’aller plus loin que la vision outils que l’on peut avoir habituellement. Une CDP permet a minima de rattacher des sessions web entre elles. Au-delà de relier entre eux différents dispositifs, la CDP permet de relier les différentes étapes du parcours clients – étapes qui sont souvent morcelées dans une vision classique sans CDP. Cela permet de mieux activer et de mieux adresser les clients. Sur la deuxième famille de cas d’usage, on est vraiment sur une logique de désilotage de l’organisation et des données. On va faire profiter par exemple le centre d’appels de la donnée collectée sur les autres canaux, notamment le web.

Je suis passé rapidement sur l’intégration du online et du offline mais dans la mesure des conversions magasins, la CDP peut être très intéressante. Une CDP permet par exemple de savoir quelle est la part du CA générée en magasin par les visiteurs du site web. Avoir cette vision permet de replacer le site web dans un objectif global de l’entreprise, et pas seulement un objectif ecommerce. La CDP offre une vision beaucoup plus réaliste de la performance de son site web. Sur le volet activation, savoir ce qu’un client achète en magasin vs ce qu’un client achète sur internet permet aussi de déployer des cas d’usage très intéressants, d’améliorer le ciblage des campagnes media sur les canaux online et offline grâce aux données en provenance de ces deux familles de canaux.

Y a-t-il des cas où la CDP N'est PAS la solution la plus pertinente ? Si oui, lesquels ?

– En effet, ça peut arriver. Les CDP sont devenus un buzzword. Certaines entreprises viennent nous voir pour déployer une CDP parce qu’elles ont de la donnée clients et que la CDP est présentée comme la solution idéale pour les unifier et mieux les exploiter. Mais dans les faits ce n’est pas parce que l’on a des données clients que l’on doit forcément s’équiper d’une CDP. Il existe déjà plein d’outils du marché qui permettent d’ingérer de la donnée clients et de l’envoyer vers d’autres plateformes pour de l’activation, je pense par exemple aux outils d’analytics, aux outils media qui de plus en plus peuvent collecter de la donnée first party pour pouvoir s’affranchir des cookies et avoir une vision plus unifiée des parcours.

Dans ces cas-là, ce que l’on fait, c’est replacer les cas d’usage pour voir si les outils existants permettent déjà de les déployer ou pas, moyennant des paramétrages, un accompagnement. Mais parfois il y a un réel besoin de centralisation auquel répond la CDP, parce que les outils sont trop nombreux, mal connectés, avec des formats différents et des modes d’alimentation différents.

Comment calculer le Retour sur investissement d'une CDP ? Quels sont les critères de rentabilité ?

– C’est une question clé. Il faut se poser cette question avant même la phase de développement. Il faut être au clair sur ce que peut m’apporter et me rapporter les cas d’usage et la manière de les mesurer pour pouvoir justifier l’investissement. Les cas d’usage les plus simples, ce sont ceux qui vont faire de la CDP un nouveau canal marketing. Par exemple, la relance de paniers abandonnés qui va être une nouvelle source de trafic et de conversions. Je vais être capable de dire à ma direction : «Grâce à la relance panier, nous avons pu générer un ROI de X€».

Pour d’autres cas d’usage, il est plus difficile de mesurer le ROI. Ce sont tous les cas d’usage qui permettent de relier le monde online et offline. Dans ce cas, le ROI est obtenu lorsque la mise en œuvre du cas d’usage est réalisée et réussie. Même chose pour les cas d’usage liés au service client, à l’optimisation de leads en centre d’appels. Relier l’optimisation de la gestion des leads au ROI de la CDP peut prendre du temps. Il faut dans ce cas fixer des critères de ROI qui ne sont pas monétaires, comme par exemple la réduction du temps de traitement par lead.

En résumé, il est essentiel de fixer en amont du projet CDP des critères de succès, une fois dit que ces critères ne sont pas forcément des ROI monétaires.

Est-ce qu’il y a un sujet que l’on n’a pas abordé que vous aimeriez mettre en avant ?

– Avec le branle-bas de combat autour des cookies third party, la CDP va devenir une solution de plus en plus demandée. Tout le monde va devoir adopter l’approche CDP, basée sur l’exploitation de données first party, sur l’email. Cela ne signifie pas que toutes les entreprises se muniront de CDP, mais tout le monde devra mettre en œuvre des cas d’usage CDP. C’est pour cette raison que le marché de la CDP va beaucoup se développer dans les 2 ou 3 prochaines années.