A la rencontre de Yassine Hamou Tahra, consultant en CRM et transformation digitale

Yassine Hamou Tahra est consultant en CRM et transformation digitale. Ce serial-entrepreneur qui a commencé à coder au collège, diplômé d’HEC Paris, a rejoint l’équipe CustUp il y a bientôt 4 ans pour mettre son expertise en matière de digital au service des entreprises. Nous l’avons interrogé sur son parcours, sur son métier de consultant eCRM, sur les outils utilisés et les méthodes mises en oeuvre dans la réalisation de ses missions. Nous lui avons aussi posé quelques questions sur les technologies prometteuses en matière de marketing & CRM.

Yassine HAMOU-TAHRA

Yassine Hamou Tahra, consultant en CRM & Transformation Digitale

Tu es un serial-entrepreneur, peux-tu revenir sur ton parcours professionnel ?

J’ai attrapé le virus de l’entrepreneuriat assez jeune. Tout a commencé en école de commerce, lorsque j’étais à HEC. J’ai décidé de créer CitizenPlace avec des amis, une plateforme d’applications web dédiée aux organisations à but non lucratif. Nous étions à la fois passionnés par le digital et voulions monter un business qui ait du sens. Les actionnaires, les représentants du monde associatif et les utilisateurs possédaient les mêmes parts. C’était un modèle original. L’aventure a duré 3 ans. J’ai rejoint ensuite un entrepreneur aguerri avec lequel j’ai lancé la plateforme Emailing.com, une marketplace dans l’univers de l’e-mail et du marketing qui visait à mettre en relation des personnes en prospection avec des fournisseurs de logiciels ou des agences dans l’e-mailing. Pendant un an, j’ai pu étoffer mon réseau et découvrir le merveilleux monde du CRM (rires). Cette expérience m’a donné envie d’intervenir comme consultant car j’ai goûté à l’animation et à l’accompagnement d’entreprises diverses. C’est ce qui m’a amené à lancer mon cabinet de conseil Cartelis, il y a 5 ans, et à rejoindre l’équipe de CustUp peu après.

Pourquoi as-tu décidé de te spécialiser dans le digital ?

La question ne s’est jamais vraiment posée. J’ai commencé à coder lorsque j’étais en 6e ou en 5e et j’ai lancé mon premier site. C’était très naturel pour moi. A posteriori, je dirais que ce qui me plaît est le fait que ce soit un domaine à la fois très rationnel et créatif. Il faut savoir casser les codes établis. C’est intéressant pour un jeune qui a envie de créer de nouvelles choses.

Peux-tu nous en dire plus sur ce site que tu as lancé au collège ?

Le site était dédié à la nouvelle génération de jeux-vidéo. Il informait les internautes sur ce qu’allaient devenir les jeux dans 5 à 10 ans. Il permettait aussi, via un forum, d’échanger et de vendre des jeux. C’était comme ça que j’imaginais gagner de l’argent. Malheureusement, comme 99% des startups lancées par des personnes de moins de 18 ans, c’était compliqué (rires). Mais ce fut tout de même une belle expérience.

Quelle est ta spécialité aujourd’hui en tant que consultant ?

Il y a deux univers : la web analyse et le marketing relationnel. Ce sont deux univers qui traditionnellement se côtoient assez peu. La web analyse regroupe une population plutôt jeune avec un profil ingénieur. Google Analytics a connu une expansion assez récemment, entre 2005 et 2010. Alors que l’univers du marketing relationnel regroupe des personnes plus expérimentées. J’ai développé une vraie expertise à la croisée des deux mondes. Aujourd’hui, un directeur marketing n’a pas envie d’avoir d’un côté le parcours qui a lieu sur son site et de l’autre côté le parcours qui a lieu en boutique. Il a envie d’agréger toutes ces informations et de savoir quelles sont les pages web visitées par les personnes qui ont beaucoup dépensé. La vision 360 est un vrai besoin. Grâce à des outils, il est possible de rapprocher le online et le offline, les données CRM et les données comportementales. J’aide les entreprises à améliorer leur connaissance client sur tous les canaux en montant une base de données marketing. Aujourd’hui, dans une architecture CRM, les sociétés ont souvent plusieurs logiciels. Elles peuvent en avoir un pour les commerciaux et un pour le marketing. L’approche moderne est d’avoir une base de données sous-jacente à ces deux outils qui permet de synchroniser les informations. C’est encore plus important lorsqu’une société possède une dizaine de logiciels.

Avec une couche d’intelligence, ce genre d’outil doit être encore plus puissant ?

Tout à fait. Certaines bases de données marketing sont très brutes et servent à agréger les données. D’autres sont plus intelligentes et peuvent, par exemple, proposer un score de potentiel. Elles permettent d’orchestrer des campagnes marketing sur plusieurs canaux.

Est-ce similaire au marketing automation ?

C’est un peu différent. Avec les outils de marketing automation, c’est la société qui construit son scénario. Alors que les outils qui émergent sont davantage des customer experience platforms. Ils analysent le parcours client et déclenchent tel ou tel scénario selon l’appétence du client et son comportement. Ils sont en amont des outils de marketing automation.

Peux-tu revenir sur les missions que tu as effectuées avec CustUp ? Quelles ont été les grandes étapes de ces missions et à quelles problématiques répondaient-elles ?

J’ai eu la chance de faire plusieurs missions avec CustUp. J’ai commencé avec des entreprises telles que Françoise Saget ou Psychologies. Aujourd’hui, j’effectue des missions pour Euler Hermes, Truffaut ou La Maison du Chocolat. J’ai effectué une mission de transformation digitale très intéressante pour Burger King. Il s’agissait d’accompagner la direction marketing dans la définition et le déploiement d’une nouvelle stratégie digitale. C’est une entreprise qui va très vite et qui cherche à casser les codes. Nous étions plusieurs consultants CustUp avec des profils différents. La manière de travailler dans un environnement assez complexe a été vraiment enrichissante. J’ai beaucoup appris humainement. J’étais directeur de mission. Mon job était de s’aligner avec la direction marketing et d’établir un plan clair sur plusieurs mois. Il fallait s’assurer de bien dérouler ce plan d’action. Burger King a fait appel à CustUp car il est difficile de monter une équipe digitale rapidement. C’était un enjeu important pour eux car ils venaient d’installer de nouvelles bornes de commande qui permettaient d’entamer une vraie démarche relationnelle avec les clients. Surtout que leur principal concurrent avançait déjà très vite sur ce sujet. On a donc joué les « intérims » le temps qu’ils mettent en place une équipe digitale en interne. La démarche de la société Françoise Saget est également intéressante. Elle est en train de passer d’un modèle de vente par catalogue à un modèle de vente sur le digital. Eux aussi sont en train d’opérer une transformation digitale. Depuis le début de la mission il y a plus de deux ans, j’ai pu constater que les pratiques et les réflexes ont changé en interne.

Que préfères-tu dans ton métier de consultant ?

En dehors du fait qu’il est possible de voir des choses et de rencontrer des personnes variées, ce que j’apprécie particulièrement, c’est qu’il faut à la fois avoir une approche stratégique et une approche opérationnelle. Il faut aider le client à prendre du recul sur le sujet, à hiérarchiser ses objectifs et à réfléchir aux leviers les plus pertinents pour y répondre. Il faut aussi être un accélérateur opérationnel et aider le client à aller plus vite. Cette combinaison est intellectuellement passionnante. C’est tout aussi enrichissant que de passer d’un client à un autre.

En quoi consistent les méthodes agiles et quelles sont leurs avantages ?

L’agilité est à la mode dernièrement. Elle a fait ses preuves, que ce soit dans la R&D ou dans un environnement plus opérationnel dans de plus petites sociétés. Dans un mouvement de digitalisation, il faut réagir très vite. Il faut tester et s’adapter très rapidement pour ne pas se faire doubler par ses concurrents. L’agilité est un cadre méthodologique qui permet d’aller beaucoup plus vite. Les méthodes agiles demandent une organisation plus horizontale. Elles demandent un investissement important de la part des développeurs ou des techniciens et de la part du porteur de projet. Ce rôle de porteur de projet est difficile à avoir dans les grandes sociétés où ces personnes ont l’habitude de se reposer sur des chefs de projet extérieurs.

Les méthodes agiles vont-elles de pair avec la transformation digitale ?

Les méthodes agiles consistent à répondre au marché rapidement en ajustant sa proposition de valeur. C’est souvent une réflexion autour d’un produit, plus qu’une question organisationnelle plus large. Tout ça peut être intégré dans les grands mouvements de la transformation digitale, mais l’agilité répond avant tout à un besoin de réactivité et d’adaptabilité face au marché.

Pourquoi les entreprises doivent-elles être agiles ?

Elles le doivent car la chaîne de valeur dans tous les secteurs change à cause du digital. L’ubérisation du secteur du transport ou celui de l’hôtellerie en sont les exemples les plus flagrants. Dans beaucoup de secteurs, il y a une transformation de la répartition de la valeur ajoutée sur la chaîne. A l’image d’Uber et d’Airbnb, ce n’est plus celui qui possède la licence ou les murs qui est en possession de la valeur ajoutée. Elle s’est déplacée plus en amont. Autre exemple : Google a plus de valeur ajoutée que la Presse en termes de contenu car il se situe en amont dans le parcours utilisateur. Il est indispensable d’anticiper les changements à venir.

Quels sont aujourd’hui les outils les plus efficaces qui permettent de gérer la Relation Clients ?

Je préfère utiliser le terme de dispositif car cela inclut la relation entre les différents outils et la manière dont on les définit. Des sociétés ont des logiciels CRM très solides, mais avec un  niveau d’exploitation faible. Ce n’est pas à cause de l’outil. C’est plutôt dû à un manque de dispositif cadré qui prend en compte la création et les tests de nouveaux scenarii. La question est de savoir comment mettre en place un dispositif pertinent. La clé est d’y aller étape par étape et d’avoir une cohérence entre le SI marketing, l’architecture technique et la capacité à l’exploiter. Dans les sociétés traditionnelles, le goulot d’étranglement se trouve dans le fait que la DSI et l’équipe marketing soient assez éloignées. Il faut donner de l’autonomie aux équipes marketing avec des outils plus légers pour gérer leurs flux de données. Si je devais donner des outils pertinents, j’insisterais sur une catégorie qui est en train de naître : les customers data platforms (CDP). Ce sont des bases marketing gérées par le département marketing. Il peut créer des scores et des segments et envoyer ces données à un outil en particulier. C’est intéressant car aujourd’hui nous sommes en mesure, grâce à ces nouveaux outils, d’avoir une autonomie complète sur la gestion de sa base de données.

Faut-il nommer une personne en charge des données ?

Tout dépend des besoins. Avec le RGPD, il y a une fonction qui a vu le jour : le Data Protection Officer (DPO). Cette personne à un rôle qui mêle data et juridique. Ce n’est pas le même périmètre que la personne qu’on appelle Chief Data Officer, dont la mission est de définir des cas d’usage à fort potentiel en valorisant la donnée.

Que penses-tu de la blockchain ? Comment peut-elle être utile dans le domaine du marketing ?

Les cas d’usage en BtoB sont encore assez rares. Il existe des choses autour de l’affiliation par exemple dans l’univers de la publicité ou des médias. Mais il s’agit de premières idées. Nous sommes encore loin d’avoir des solutions matures pour répondre aux enjeux business des sociétés. Il va falloir attendre plusieurs années avant de voir apparaître des solutions pertinentes.

Si ce n’est pas la blockchain, quelle est la technologie qui selon toi aura le plus d’impact dans les domaines de la Relation Clients et du marketing ?

C’est indéniablement l’intelligence artificielle. Il est possible de mettre en place des centaines de scenarii, mais les maintenir est beaucoup plus difficile. Des dispositifs relationnels matures sont mis en place au départ, mais de nouveaux segments sont adressés. Il faut donc ajuster les scenarii. Demain, l’intelligence artificielle pourra le faire automatiquement en fonction de chaque nouveau segment. Des plateformes commencent déjà à aller dans cette direction, mais nous en sommes encore aux balbutiements.

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Propos recueillis par Jordane Feuillet.

Propos recueillis par Jordane Feuillet.